Les Africains qui ont écouté dans les tout débuts des années 80, l’orchestre de la police nationale gabonaise, « les Diablotins », ont pu se rendre compte des objectifs que les fondateurs de la radio africaine fixaient à cette dernière, objectifs qui n’ont pas été atteints de l’avis général.
Nous faisions allusion il y a quelques instants à l’orchestre « les Diablotins » qui chantèrent le jour du premier anniversaire de la première radio commerciale africaine, un air dont on peut aujourd’hui encore se souvenir, dans lequel ils avaient incrustré les paroles suivantes: « l’Afrique qui jadis se recueillait dans le calme de la nuit, aujourd’hui est parsemée de sons et d’ambiance. Africa n° 1, notre radio panafricaine oyéé, créée le 7 février 1981, Africa oooh oooh, Africa n° 1… ». Il est impensable qu’à l’entente d’une telle sonorité, des cœurs avisés ne vibrent pas et ne se souviennent de cette aventure osée, disaient certains, qui aurait tenu la route, n’eussent été les erreurs de parcours et le contexte post-90, caractérisé non seulement par les exigences des changements technologiques, mais aussi par le départ des partenaires français (RFI), japonais (NHK) et Radio Suisse normande entre autres et pour finir, la crise libyenne qui a officiellement empêché « le pays de Mouammar Kadhafi » de poursuivre sa politique d’investissement en faveur d’un outil que le guide de la Jamahiriya arabe libyenne disait être de souveraineté avec tout ce que cela comportait de sous-entendus.
40 ans après et alors que la radio de Denise Boukandou, de Pierre-Noël Botsika Bobé, de Flavienne Issembé, Patrick Nguema Ndong, du « démon de midi », Lise Ossey, Nadine Gérard, de Dread Pôl, de Teddy Ossey, de Paul Mbadinga Matsiendi, Léon Folquet et autres Ronny Mba Minko, pour ne citer que ces quelques acteurs dont le nom fait et fera toujours autorité, ait soufflé sa première bougie, que reste-t-il de ce que des instituts de sondage au nombre desquels « Marcomer Gallup International » qualifiaient de radio élitiste, mais qui en vérité, accompagnait jusqu’au paysan au champ, de quoi nous souvenir des thèses défendues dans son ouvrage « la radio en Afrique noire » par le Pr André Jean Tudesq de l’Université de Bordeaux III ?
Les images parlent aujourd’hui d’elles-mêmes, nous donnant à voir et observer la décrépitude avancée pour ne pas dire l’agonie d’un instrument qui, de l’avis de bon nombre, méritait qu’on le sauvât. Les témoignages des agents déchirent le cœur de ceux qui ont la fibre africaine, surtout quand ils en sont à se demander à quel saint se vouer, eux, qui n’attendent, le Gabon étant un pays de droit, qu’à être libérés dans les règles de l’art pour entrevoir leur avenir peut-être autrement. Ils estiment avoir trop souffert dans un pays qui, pour leur avoir donné l’opportunité de porter sa voix et celle du continent en dehors de ses terres, ne leur ait pas fidèlement rendu l’ascenseur. D’où toutes les frustrations et déceptions, somme toute légitimes, qu’on peut lire sur les visages de femmes et hommes qui, pour avoir eu à cœur d’exercer leur métier de la meilleure façon qui soit, on fini par vivre le calvaire. Combien de temps, se demandent-ils, cela durera encore ?
Jérémie-Gustave Nzamba